Il existe aujourd'hui un vaccin contre le cancer de l'utérus, le 2 e cancer le plus fréquent chez la femme. Le Dr Rouzier, gynécologue obstétricien à l'hôpital Tenon à Paris a répondu à toutes vos questions lors d'un chat.
En quoi les frottis diminuent le risque d'attraper un cancer du col de l'utérus ?
Dr Roman Rouzier : Les frottis permettent de dépister et de traiter les états pré-cancéreux. On évite ainsi la survenue d'un cancer.
Du moment que je fais régulièrement des frottis, je suis protégée contre le cancer du col de l'utérus ?
Non. Le frottis protège partiellement (il diminue le risque par 3 ou 4). De plus, le frottis sert à dépister des états pré-cancéreux qui nécessitent un traitement (ablation d'une partie du col de l'utérus) et comportent des risques pour les grossesses ultérieures. En fait frottis et vaccination sont complémentaires.
Je n'ai pas fait de frottis depuis 4 ans car c'est mon généraliste qui me prescrit la pilule, je ne vais pas souvent voir de gynécologue. Je m'inquiète... Quel est votre avis ?
Il faut absolument suivre les recommandations : 1 frottis à 25 ans, 1 frottis à 26 ans puis 1 frottis tous les 3 ans jusqu'à 65 ans. Je vous recommande donc de consulter.
Une fois vaccinée, les frottis ne sont donc plus nécessaires ?
Si, ils sont toujours nécessaires : en fait le vaccin est efficace contre 2 souches de papillomavirus. Ces 2 souches sont responsables de plus de 80 % des cancers du col. Mais afin de ne pas prendre de risque sur les autres souches, il faut réaliser des frottis chez les femmes vaccinées.
A quel âge le vaccin est-il recommandé et doit-on faire des rappels. Si oui, à quelle fréquence ?
Dr Roman Rouzier : L'âge recommandé est 14 ans avec un rattrapage possible pour les jeunes filles/femmes âgées de 15 à 23 ans si elles sont vierges ou si les premiers rapports datent de moins d'un an. Pour l'instant, il n'est pas nécessaire de faire des rappels mais des études sont en cours.
Pensez-vous que ce soit un âge pour faire vacciner sa fille ? Ne pensez-vous pas que cela banalise les rapports sexuels auprès de trop de jeunes filles ?
L'âge moyen des premiers rapports sexuels est 17 ans et cela n'a pas changé depuis 20 ans. Je ne pense pas que la vaccination va bouleverser les moeurs.
Vacciner avant les premiers rapports sexuels est important pour optimiser l'efficacité. Il faut bien comprendre que 80% des femmes vont rencontrer le papillomavirus : ce n'est pas une maladie honteuse.
Pourquoi ne peut-on pas se faire vacciner après 25 ans ?
Parce que les études menées après 25 ans sont encore en cours. Le bénéfice est certainement bien inférieur à une vaccination à 14 ans.
Chez une femme de 25 ans n'ayant pas eu de rapports, la vaccination reste-t-elle conseillée ?
En théorie, l'indication est judicieuse. Néanmoins nous ne disposons pas de données (les études ont été menées chez des femmes plus jeunes). Il ne faut pas sortir des recommandations.
Ma fille veut bien faire le vaccin mais elle refuse tout visite chez un gynécologue. Est-ce indispensable pour se faire vacciner ?
Dr Roman Rouzier : Absolument pas, elle peut voir votre généraliste. L'examen gynéco n'est pas obligatoire.
Je voudrais me faire vacciner mais j'ai déjà eu des rapports. Je pourrai le faire ou pas ?
Cela dépend de quand datent les rapports : s'ils datent de moins d'un an, vous pouvez faire le vaccin. Il faut avoir moins de 23 ans.
Le vaccin est-il remboursé par la sécurité sociale ? Combien coût-t-il ?
Le vaccin est remboursé par la sécu. Il coûte 140 euros par injection (il faut en faire 3).
On voit 2 types de vaccins dans les médias, ce sont les mêmes ? Sont-ils aussi efficaces l'un que l'autre ?
Il existe en effet 2 vaccins : le premier sur le marché (Gardasil) est quadrivalent, c'est-à-dire qu'il protège contre 2 souches de papillomavirus qui donnent des cancers (16 et 18) ainsi que sur 2 souches de papillomavirus qui donnent des verrues génitales.
Le deuxième disponible : Cervarix est bivalent, il protège contre 2 souches de papillomavirus qui donnent des cancers (16 et 18) et il a l'avantage de conférer une protection anticorps prolongée (plus de 6 ans) et une protection longue est nécessaire.
Aujourd'hui, quel est le succès du vaccin en France ? Quelle est la proportion de jeunes femmes à se faire vacciner ?
La couverture vaccinale est correcte. On peut regretter que ce soit essentiellement des jeunes filles/femmes de 15 à 23 ans qui se fassent vacciner et que l'observance soit médiocre (Il faut faire 3 injections).
Ce vaccin comporte-t-il des risques pour la santé ? Des effets secondaires ?
Dr Roman Rouzier : La vaccination engendre souvent une réaction locale (c'est le mécanisme d'action).
Aucun effet grave n'a été rapporté suite à ces vaccins malgré ce que l'on peut lire sur Internet.
L'Agence européenne du médicament recommande donc leur utilisation.
N'y a-t-il pas un risque à faire vacciner nos filles comme ce fut le cas il y a des années avec le vaccin contre l'hépatite ?
Les études sur le vaccin contre le papillomavirus sont solides.
Je tiens à préciser qu'il n'y a pas de risque à vacciner les enfants contre l'hépatite B !
A-t-on fait des études sur la baisse du nombre de cancers dans les pays où le vaccin existe depuis longtemps ?
Les études ont plusieurs années de recul et on a démontré la diminution des états pré-cancéreux. La diminution des cancers ne sera observée que dans une dizaine d'années. Diminuer les états pré-cancéreux est tout de même très intéressant car c'est source de stress et de risque sur une future grossesse.
Le cancer du col de l'utérus est-il fréquent en France, par exemple par rapport au cancer du sein ?
Dr Roman Rouzier : Le cancer de l'utérus, c'est 4 000 nouveaux cas par an.
Le cancer du sein : 35 000, donc beaucoup plus. Il convient néanmoins de noter que le cancer de l'utérus touche des femmes jeunes voire très jeunes.
A quel âge risque t-on le plus de risque de contracter le virus ?
Le pic d'incidence, c'est à dire le moment où on attrape le plus facilement le virus, c'est 17-23 ans.
C'est-à-dire juste après les premiers rapports sexuels.
Une prévention par vaccination doit donc être réalisée avant l'infection, c'est-à-dire avant les premiers rapports sexuels.
Sur les 80% qui rencontrent le virus, combien "l'attrapent" ? Et combien développeront ensuite un cancer ?
Toutes les femmes qui rencontrent le virus l'attrapent. Elles vont l'éliminer pour la plupart spontanément. Cependant, 20% des femmes vont avoir un frottis pathologique au cours de leur vie.
3 à 4 % des femmes développent un cancer en l'absence de dépistage et 1 % chez les femmes dépistées (mais cela nécessite un traitement comme l'ablation d'une partie du col de l'utérus).
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